L’ITEV est partenaire du projet « En DEVENIR / Parcours de vie, parcours de ville » mené au collège Simone Veil dans le quartier des Cévennes par la compagnie de danse Yann Lheureux. Pour nous, quatre élèves de la 5A rattachée au projet ont accepté de revenir sur leur expérience des derniers mois et de nous en faire part par écrit.
Nous sommes la classe des 5A du collège Simone Veil du quartier Petit Bard – Cévennes à Montpellier. Depuis septembre 2021, nous travaillons sur la maladie d’Alzheimer. C’est une maladie des troubles de la mémoire qui attaque le système nerveux. Nous travaillons avec Yann Lheureux (chorégraphe et danseur ndlr), Maxime Geaymond (chargé du pilotage de l’ITEV ndlr) et Anne Marcilhac (directrice de l’ITEV ndlr) et des danseurs contemporains.
En septembre 2021, nous avons assisté à une représentation du spectacle de Yann Lheureux qui parle de la maladie d’Alzheimer. Il parlait de sa famille car sa mère souffre de cette maladie. Il nous montrait des mouvements de bébé, d’enfant, d’adolescent, d’adulte, de personne âgée pour représenter les étapes de la vie. Petit à petit, il enlevait des photos, car il les oubliait petit à petit.
Pour la semaine bleue, nous avons aussi présenté un spectacle à d’autres classes du collège. Quatre danseurs de la compagnie dansaient les mouvements représentants différents âges.
Nous sommes partis à la journée internationale de lutte contre la maladie d’Alzheimer. Nous sommes allés Place de la Comédie rencontrer les bénévoles de France Alzheimer. Nous leur avons posé des questions sur les symptômes de cette maladie, et si on peut en guérir. Nous leurs avons aussi demandé pourquoi ils étaient bénévoles et ce qui les motivait. Souvent une personne de leur famille l’avaient eu et cela leur tenait à cœur. Nous avons aussi rencontré une personne qui souffrait de la maladie.
De la danse pour réfléchir sur la maladie
La première fois que Yann Lheureux a dansé nous avons ressenti de la gêne. Il s’asseyait sur nous, grimpait au mur, se roulait par terre. Il faisait des choses gênantes : il a mis un voile sur une des élèves. Elle s’est sentie un peu gênée et surprise. Il dansait et parlait en même temps et arrachait des photos de sa famille. Derrière la dernière photo de sa maman, il y avait un miroir cassé. Le miroir cassé représentait la mémoire abîmée. Au fur et à mesure qu’il parlait, nous avons compris qu’il mimait la maladie d’Alzheimer avec la danse. Même si le spectacle était en septembre il nous a beaucoup marqué. Nous étions gênés et nous nous souviendrons longtemps de cette expérience. Nous comprenons mieux ce que c’est d’être malade de l’Alzheimer. Ça ne s’oublie pas.
Emma, Nacim, Ouda et Steven, élèves de la 5A
**
*
Dans le cadre de ses missions de diffusion des savoirs, l’ITEV s’implique dans le projet EN DEVENIR. Ce projet d’éducation artistique et culturelle « s’adresse en priorité aux enfants et aux jeunes du Quartier des Cévennes pour créer des situations apprenantes et questionner, de manière sensible, la relation entre l’identité et le territoire ». Dans cette démarche de démocratisation culturelle l’ITEV collabore avec la compagnie de danse Yann Lheureux ainsi que de nombreux autres partenaires.
Autrement qu’ainsi s’ouvre sur l’intimité du chorégraphe dont la mère est atteinte de la maladie d’Alzheimer. Elle s’invente un présent, maintenant que le passé lui échappe. Mais déjà, ce présent se dérobe lui aussi, et à mesure que s’évanouit toute temporalité : il inquiète… Que reste-il ? Lorsque le maintenant s’effrite ? Que reste-t-il quand le socle de l’identité disparaît ?
Partant du cas de sa propre mère, Yann Lheureux a enquêté avec son équipe sur le terrain de la maladie d’Alzheimer, ouvrant la problématique intime à un questionnement plus large sur le statut de la mémoire, de la perte, de ses aléas, à l’époque du stockage massif et illimité, des devoirs de mémoire et des oublis collectifs, posant ici Alzheimer en l’une des maladies du siècle. La pièce est ainsi initiée et nourrie par des échanges avec des chercheurs en neurosciences, gériatres, psychologues, acteurs associatifs, et de nombreuses rencontres avec soignés et soignants lors de résidences en EHPAD.
La pièce reflète la complexité de ce sujet à travers un maillage de danses, de sons, de textes et de situations créées en lien avec les spectateurs, faisant de ce trouble de la disparition une possible source d’apparition. Tous et toutes partagent le même socle et les corps dialoguent avec celui du danseur. Tout comme les malades d’Alzheimer, c’est à partir des bribes du présent que chaque spectateur reconstitue sa propre continuité.