En 2030, les plus de 65 ans seront plus nombreux que les moins de 15 ans. Pour faire face à ce défi démographique, le gouvernement a lancé en novembre 2023 la stratégie « Bien Vieillir », pour préparer la France de demain. Mais n’y a-t-il qu’un bien vieillir ? Et à quoi renvoie-t-il ?
Au sens strict, on définit le « bien vieillir » ou « vieillissement réussi » comme la capacité d’un individu vieillissant à préserver de bonnes capacités physiques et mentales lui permettant d’être autonome et socialement actif (Rowe et Kahn 1997, Successful Aging). Mais n’est-ce pas réducteur et symptomatique de notre société de réduire le vieillissement à une course aux facultés physiques et mentales dans laquelle on peut remporter la victoire ou échouer ? Dans notre ouvrage « Environnement et Vieillissement, partenaires ou adversaires », Louis Ploton, psychiatre, gérontologue et ancien membre du Conseil de Direction de l’ITEV souligne qu’« à la réflexion, je serai plus tenté de proposer la notion de vieillissement confortable plutôt que celle de vieillissement réussi ». Ce dernier consisterait en un confort physiologique à préserver malgré de possibles problèmes de santé, un bien-être psychique impliquant l’investissement de centres d’intérêt et une sécurité affective sous la forme de groupes d’appartenance (famille, amis, communauté religieuse, animaux de compagnie…).
Bien vieillir ou bien vivre
La tentative de définition du bien vieillir en terme uniquement de bonne santé laisse entrevoir une vision homogène et réductrice du vieillissement. Des parcours de vie et des aspirations différentes suscitent des aspirations pour les vieux jours qui ne sont pas forcément les mêmes, replaçant la nécessité de choisir son vieillissement au cœur de la conception d’un « vieillissement réussi ». Comme le rappelait brillamment Colette Eynard, « la vision du vieillissement est très techniciste […] tout est thérapeutique : les animaux, la musique, les jardins la cuisine… la toute-puissance biomédicale est partout. Même les seniors sont abreuvés de conseils en tout genre sur le bien vieillir, bien se nourrir, bien se porter, bien faire du sport. Ils n’échappent pas à cette sollicitude érigée en obligation de santé publique ». Dès lors, est-ce que bien vieillir ne consiste pas justement à ne plus penser son vieillissement en terme d’objectifs à atteindre mais en termes de désir, de plaisir. Bien manger parce que l’on aime bien manger, faire du sport pour le plaisir de l’effort et finalement perpétuer les activités que l’on a apprécié tout au long de notre existence ? Bien-vieillir, ce serait donc rester libre et affirmer ses choix dans la continuité de ceux qui ont présidé nos vies, sans se conformer à un modèle quelconque.
Œuvrer pour le bien vieillir
L’Institut Transdisciplinaire d’Étude du Vieillissement a été créé pour apporter des éléments de réponse au défi de la transition démographique en France et dans le monde. Au fil des années, il s’est enrichi des différentes sensibilités des membres de son conseil de direction tels que Louis Ploton ou Colette Eynard, visions qu’il continue de promouvoir après leur départ.
Nous pensons, comme le pensait Colette Eynard, qu’il ne peut y avoir de bien vieillir sans liberté de choisir. C’est pourquoi nous accompagnons le projet Design Citoyen, qui propose de rendre la parole aux personnes âgées pour qu’elles expriment elles même le futur qu’elle souhaite pour leur ville, pour leur village.
Cette notion de liberté constitutive de l’autonomie nous amène aussi à nous investir dans des projets de formation tel que le Campus des Métiers et des Qualifications « Santé tout au long de la vie ». En effet l’autonomie de décision n’enlève rien au besoin d’accompagnement au quotidien de nos aînés. Améliorer la formation et les conditions de travail des aidants professionnels doit permettre un meilleur accompagnement et une meilleure prise en compte par ces derniers des besoins et des envies de la personne âgée, en prenant de la distance avec toute approche trop médico-centrée.
Comme le souligne Louis Ploton, nous pensons que le vieillissement est plus confortable accompagné et investi. C’est dans cet objectif que nous accompagnons le projet « Aller Vers » de la Carsat Languedoc Roussillon, qui vise à repérer les personnes âgées isolées pour leur proposer de renouer avec une activité physique, sociale, ludique, basé sur leurs envies.
C’est aussi pourquoi nous avons organisé l’événement Equip’Adaptée, pour promouvoir une activité physique adaptée à ceux qui en éprouvent l’envie, des interactions sociales riches et intergénérationnelles et avant tout, passer du temps à sourire et rire ensemble.